dernier souffle dans les cendres. (rite de passage)

Il y a comme une odeur de cramé dans l'air. Les effluves de fumée remontent jusqu'à tes narines, empoissonnent tes poumons et brûlent les rétines de tes beaux yeux bleus. Ce qui a tout l'air d'être un incendie, te surprend dans tes activités mais ne t'étonnes pas réellement sur le fond. C'est comme si tu avais toujours su que ça allait arriver. Tu maudis l'insalubrité de la maudite demeure familiale des Gaunt. Entre les déchirures sur les murs, l'humidité oppressante dans les pièces les moins occupées du manoir et les toiles d'araignées tissées entre deux bouts de bois abîmés par les années, tu as bien du mal à imaginer quelle a pu être la splendeur qui a un jour régné en ces lieux. Parfois, il t'arrive même de plus croire aux histoires racontées par tes parents, tel le souvenir d'une autre époque. Des balivernes, ose prétendre mais sous silence, ton esprit écoeuré. Tu cries. Tu appelles à l'aide. Du moins tu essayes mais Patsy, aucun son ne sort de ta bouche. Tes lèvres brassent de l'air alors que tes yeux scrutent l'environnement à la recherche d'un passage. Tu prends peur face à ces flammes qui ne cherchent qu'à t'avaler, tu penses que tu n'aurais pas du remettre les pieds là où tu as pourtant grandi. Tu regrettes. D'ailleurs, pourquoi est-tu revenue ? L'incohérence de ce constat fait trembler le sol, les murs, les flammes. Le décor semble ensuite aspiré dans un tourbillon alors que lentement, un nouveau s'installe et t'entoure. Tu ne reconnais pas tout de suite les pavés fendus d'un village irlandais où tu as pu joué quelques fois étant enfants en accompagnant ta mère pour ses achats. Le détail des enseignes te permet de mettre un nom sur le village. Comment t'es arrivée là ? Tu ne peux pousser la réflexion plus loin, l'odeur de brûlé se fait plus forte désormais. Plus prenante. Ta gorge te piques. Tu suffoques, Patsy et c'est douloureux. Et plus tu cherches à t'éloigner de l'incendie, plus tu t'en approches. Il fait très chaud mais tu es la seule à t'en soucier. Pourquoi ces moldus n'ont-ils pas peur ? Ne sont-ils tout simplement pas déranger par la température ? Tu l'as toujours su, ils sont vraiment étranges. Ils ne sont pas comme toi. Comme vous, les sorciers. Des anomalies, des abominations. Ta langue siffle, eux aussi tu les maudis. Puis tu détournes ton regard, ils ne méritent pas ton attention. Tu reportes alors ton intérêt en direction d'une danse étrange au milieu de la place. Tu découvres un grand brasier autour duquel des moldus dansent. Probablement encore une de leur célébration stupide... Cependant tu regardes, tes yeux hypnotisés par les mouvements imprévisibles des flammes. Une fascination aussi intense que brève, qui précède la terreur. Il y a quelqu'un au milieu, coincé dans ce feu qui n'a tout de suite plus rien de beau à tes yeux. Pourquoi personne ne réagis ? Tu t'offusques quelques instants avant de réaliser. Les morceaux du puzzle finissent de s'assembler. T'approcher te permets de reconnaître la personne qui agonise au milieu des flammes. Tu ne peux que la reconnaître parce que c'est toi, Patsy. Pourtant, tu n'es pas sur le bûcher puisque tu regardes. Instinctivement, tu passes tes mains sous tes yeux. Tu les vois, mais tu vois également au travers. C'est un choc, Patsy. Tu es morte. Tu es devenue un fantôme. Tu cries, et cette fois ça fonctionne. Un son sinistre se fait entendre, tu te fais peur à toi-même. « C'est horrible. » Tu es choquée mais aussi très en colère, alors tu commets ta première réaction en tant que fantôme. Tu fonces dans le tas, tu les traverses les uns après les autres, comme si tu nourrissais l'espoir qu'il puisse ressentir en eux l'ampleur de ta haine.