kiss me a thousand times (lukian)

Le craquement est sonore dans l’allée magnifiquement fleurie, majestueuse et pourtant ô combien silencieuse à cette heure de la soirée. Il n’est pas si tard mais il n’est pas si tôt quand même. Naiara sait que les enfants ont déjà du être couchés et si tout va bien Lukian est rentré. Elle ne sait pas si elle l’espère. Elle sait juste qu’il doit être là. La contrariété qui la ronge semble se sentir dans son aura. Pire que cela : ce sont ses cheveux qui changent de couleur au fur et à mesure qu’elle approche de la villa. La porte d’entrée s’ouvre sous sa main baguée et elle vient se pencher pour défaire ses chaussures à talon.

Madre de dios, qu’elle a mal aux pieds.

Talons tant aimés et pourtant instruments de tortures. C’est à la fois l’émancipation et la torture de son corps. Elle est bien contente de s’en délester. La maison est silencieuse, probablement que les quelques esclaves sont partis se coucher vu qu’on n’a plus besoin de leur service. Naiara bouge alors et sait qui elle cherche en ces lieux qu’elle arpente comme la reine d’un empire invisible et pourtant bien réel sur bien des points. Le salon bleu est vide, la grande salle de réception aussi et d’un mouvement gracieux, elle vient récupérer le bijou dans ses cheveux qu’elle libère. Mèches redevenues naturelles, elle laisse tomber le bijou par terre sans grande considération. Puis, c’est autour de ses boucles d’oreilles, lourdes et designs qui viennent retrouver le sol alors qu’elle monte les escaliers. Le collier de diamant vient finalement se poser sur la rambarde et c’est là qu’elle voit à l’autre bout du couloir richement décoré d’où les tableaux semblaient déjà endormis, qu’elle voit le rai de lumière provenant de la porte entre ouverte.

Son bureau, évidemment.

La cubaine vient pousser la porte sans frapper. S’il l’a laissée entre ouverte c’est qu’il n’est pas tant occupé et de toute façon, même s’il l’était, elle serait quand même passé quand bien même parfois. La pièce est à l’image de son propriétaire et Naiara s’approprie l’espace comme s’il était le sien. Elle s’approprie toujours l’espace avec aisance, provocation et décontraction. Son regard aux iris chocolat se pose sur celui qui sera toujours l’homme de sa vie. Lukian Fabregas est beau assis dans son fauteuil. Un roi ? Mieux que cela : un empereur. Celui de son cœur.

« Mi marido. » dit-elle d’une voix doucereuse, l’amour dans la voix, un sourire étirant ses lippes alors qu’elle s’approche de l’endroit où il garde ses boissons. D’un mouvement précis, elle se saisit de deux verres et les remplit et vient s’approcher de son mari d’un pas presque félin.

Elle se penche pour déposer le verre devant lui et en profite pour déposer un baiser papillon et tendre dans son cou. La cubaine se redresse alors pour l’observer avant de se dérober et de venir prendre place en face de lui. Son regard ne le quitte pas et elle semble d’un étrange calme alors que deux heures plus tôt, elle s’énervait à en hurler de rage sur Sevda, véritable furie.

Il doit bien le savoir : ce calme ne présage rien de bon.

La brune porte ses propres lèvres à ses verres et vient y tremper les lèvres. Elle préfère le rhum, définitivement, mais boire du whisky avec lui c’est leur tradition une fois de temps en temps. Tandis que le liquide coule dans sa trachée, le pied nu de Naiara sous sa robe vient chercher la jumelle masculine de sa moitié et remonte avec provocation. Jamais elle ne se dérobe à son regard. Jamais, même quand elle vient reposer le verre devant elle et que son corps change subitement.

Ce ne sont plus les yeux chocolats ni les longues mèches éclaircies par le soleil qui font face à Lukian Fabregas mais bel et bien la rousseur particulière et les grands yeux de biche russes.

Naiara Fabregas prend l’apparence de Sevda Dzhafarova.

Et enfin, une fois qu’elle est toute entière comme la née-moldue, sa peau devenue blanche comme le lait, mais la voix étant celle de la cubaine, Naiara lâche enfin :

« Est-ce que tu l’aimes ? »

Phrase assassine et déjà la pression monte. La pression de la jalousie et la colère. Il peut bien aimer qui il veut, elle n’a jamais rien dit, toujours voulu qu’il soit heureux. Mais pas elle, Sevda. Jamais. Pourtant, elle ne sait comment interpréter ce qu’elle voit, ce qu’il fait et si elle sait qu’elle exagère, Naiara Fabregas ses raisons sont bien plus multiples qu’une jalousie basée sur un amour. Il y a de multiples raisons à son comportement. Mais elle n’est pas dupe : il y a bien quelque chose. Sinon, pourquoi l’aurait-il embauchée ?