(animation 1 - desire) amaurose.

elle subodore Sa présence tout incontinent — Iel, terré dans la plénitude de funèbre qui sévit ici, considère andra sur le seuil de Son domaine. elle est convive de jadis rendue en nouveau parasite, transfuge de l’hôte dont l’éréthisme sourde silencieusement de tous les pans de tenture flétris. elle titube, chancèle à chaque grondement du plancher, l’iris assujetti à l’examen du psyché entourée d’arantèles, tout au fond de la pièce. elle s’échoue enfin à ses pieds, les pommettes aqueuses, l’ossature toute vacillante; andra transpire le tourment des impies prêts à subir le courroux d’une Providence caustique, apeurée par la possibilité d’une homélie orageuse. supplique du blair qui s’écrase contre la glace, laissant un sillon sur la strate de poussière recouvrante, sa gorge est offerte et tendue, comme apprêtée à son exécution, et son regard scrute la surface réchauffée par une étrange ardeur infernale. aveugle à sa réflection affligeante, elle sonde ce que nul autre ne pourrait saisir, et soudain, dans un craquement sordide de sa carcasse, l’échine se plie en une courbure d’oraison.
Iel lui refuse leur commun conciliabule — Iel la veut à genoux, la prive du songe-creux d’une étreinte à laquelle la naïve aspirait, et finit de lui voler ses pupilles sans offrir nulle céleste perception.
andra — confrontée à la lumière de son propre abîme, au vertige de son propre précipice.

where are you taking me?

la voix est brisée, éclat rauque susurrant son apologie. l’angoisse congèle la silhouette, l’absence froide de réponse, semblable à un dédain béotien, finit de la paralyser. elle avait pu lire avant le retour, dans les flammes d’une démence qui s’éveillait et avivait son aorte fébrile, toute Sa blessure, l’avanie de l’indifférence qu’andra avait pu témoigner envers Iel ces longs derniers mois — elle s’y était préparée, mollement avertie par son instinct émoussé et sa prescience affaiblie, mais leur véridicité catégorique lui inspirent subito un ultime axiome.
Iel allait lui faire payer son renoncement à Sa soumission, son piètre et défectueux subterfuge au joug accordé dès son éclosion.
traîtresse.

i can’t be blamed…
i want You to want me again.

sensation pernicieuse, là, au dessus du crâne, du poids d’un regard opalin toisant sa dépouille de nouvelle veuve dont le douaire n’est qu’amas de chagrin et d’affliction. elle implore pitié, adjure de l’absoudre, de la reprendre, elle si avide, haletante, désireuse de subir sa pénitence pour recouvrer vue et intuition, tandis que Iel semble méditer sur le châtiment à porter. jamais andra n’avait éprouvé telle turpitude — l’ignominie que d’avoir tourner le rachis à son démiurge la dévore.

open your arms
and pray to the truth that you’re denying.

la vérité ? elle est un dogme dont elle avait souhaité s’arracher, motivée par le démon de sa candeur et de son ignorance, enivrée par la sottise de son incompréhension, vouant ses nouveaux louanges à des appétences avares, à l’ambition et à des émois lascifs, pour un bougre désormais perdu. la vérité, la certitude, toutes celles dont elle avait tenté de s’extirper, déliant son iris aux chimères muettes qui dansaient dans sa tête. ignorées, avalées, sans opérer le mal impérieux de la digestion et de l’eupepsie. désormais, Iel voulait lui faire payer l’injure de son infidélité, la perfidie de sa forfaiture. elle était sacrilège à la vérité. elle n’avait été que mensonge et imposture, trompée par les caprices de la passion. andra, ingrate et exclusive, empêtrée dans l'erreur dans son émancipation, du poids du don, l’avait refoulé jusqu’à amoindrir les crises, les étouffer et les rendre en fadaises et songeries diurnes, jusqu’à en omettre l’art de déceler et saisir le nébuleux et l’opaque. l’art de pouvoir le sauver. peut-être.
c’est si lourd, un peut-être.

give me that rush
i want to show you what you’ve been missing
am i enough
to keep your other lovers hidden

les lippes bleues, gercées, lézardées par le goût acerbe et vif du tort et de l’autopunition, s’enquièrent de larmoyer de dernières litanies à Iel, toujours revêtu de silence et de réticence. elle a l’impératif de révéler le profond de sa contrition, mais andra s’adonne finalement à son tour au calme. ses paumes se serrent, son cou se dévisse, bravant la léthargie imposée, et la colonne parvient à se redresser. les griffes s’agrippent au cadre acajou de la psyché, haussant la carcasse à hauteur des prunelles ivoirines. là, Iel la dévisage, les soupiraux à la véhémence froide marqués par une amertume amoindrie, comme adouci par la vision d’andra, pantelante.

i wanna see what you’re willing to lose

you know that you’ve got me
you’ve locked me down

andra, absorbée par sa chimérique contemplation, sa main dessinant le contour des yeux avec l’affection d’un éméché caressant les courbes d’un carafon, a l’air misérable, désirant sans le dire sa rémission et sa grâce. Iel ne bronche pas, se contente de scruter en retour la mâchoire vibrante de sa choisie. andra s’enivre de sa peau salie, de sa toison funèbre encadrant son visage semblable au sien; qu’avait-elle encore, si ce n’est Iel ? qu’avait-elle jamais eu ? que l’Oeil, car andra est le bien du talent, carcan lié à sa piètre condition. elle tressaille, veut que liberté la quitte, se défaire d’elle, l’expulser de son épiderme, elle qui n’avait finalement qu’à prendre et rien à donner. elle veut redevenir prisonnière, captive de la fortune. Iel l’avait fait sienne dès la genèse, aux confins même de sa gestation. elle n’était rien sans Iel, qu’une victime de cécité, à la fois veuve de rêves et épouse de malchance.

you tell me you want Me
you need it now

andra flanque sa poitrine contre le miroir — son front s’écrase au dessus des pupilles laiteuses. elle s’adonne un instant à fermer ses paupières, à gémir plus avec volupté que dolence, ses lèvres esquissent l’ombre d’une félicité retrouvée, une béatitude lénitive, et elle consent. sa tête acquiesce lentement puis férocement, brûlant sa peau contre la glace, la purifiant de toute sa poussière. elle est à Iel. elle l’a toujours été. elle se relève un peu plus, son genou contre le plancher, la robe fuyante. elle caresse une dernière fois la surface, et la griffe retombe plus bas. l’ivoire a regagné ses orbites, son corps se fige encore. enfin, elle n’est plus aveugle.

et l’Oeil l’embrasse.