dark mind - quête personnelle

Scylla est hantée par cette nuit d'Avril où elle a perdu son humanité, et une question l'obsède depuis : qui ? Qui l'a mordue ? Elle décide alors, sans en parler à personne, de recourir aux services d'un pseudo-Legilimens dont elle ne connaît rien des talents pour tenter de fouiller dans son esprit et d'y déterrer des indices, afin de remonter la piste vers son agresseur qui n'est autre qu'Icarus Goyle. Mais les dangers sont importants, les secrets ne font pas bon ménage avec le régime actuel et l'incompétence de la personne à qui elle s'adresse pourrait avoir des répercutions...

Qui ?
La question la hante. Terreurs nocturnes dans lesquelles flottent un éternel point d’interrogation. Elle veut savoir. Elle a besoin de savoir. Qui, cette nuit-là, l’a mordue. Besoin de mettre un visage sur toute cette frustration, cette colère, ce chagrin. Besoin de mettre une voix, un regard, sur ce coup du destin. L’impression que ça l’apaisera, et qu’en apprenant l’identité de son bourreau, elle le comprendra. Contradiction face à un esprit qui, quelque part, demande vengeance. Demande des comptes. Pourquoi elle ? Le mauvais endroit au mauvais moment, elle le sait bien. Mais savoir lui permettra peut-être de contrer ses démons.

Quelques gallions supplémentaires glissés sous le bar du Chaudron Baveur, elle remercie la serveuse à la coupe garçonne des renseignements donnés. Un Legilimens clandestin, plus ou moins compétent, louerait ses services sur l’Allée des Embrumes, pour les âmes perdues en quête de réponses enfouies. Un coup de poker, un pari osé, mais Scylla veut le tenter. Qu’importe le prix. Elle comprend les dangers. Lors des interrogatoires, Albus Dumbledore a fouillé son esprit, découvert son secret, mais les images qu’il lui a permis de déterrer n’ont pas été suffisantes pour trouver quelque chose. N’importe quoi. Une trace, un indice, elle ne sait pas vraiment à quoi se raccrocher. Mais il faut bien se raccrocher à quelque chose. Même du vide, même du néant – rien qu’un petit quelque chose. Visage dissimulé sous la capuche de sa cape, elle quitte la taverne et s’engouffre, quelques instants plus tard, sur les pavés de l’Allée des Embrumes, alors que le soleil s’est couché depuis près d’une heure déjà.

Elle passe la porte de cette boutique de gris-gris et babioles à l’angle d’une rue – il lui semble que c’est là. Dans un souffle, rien qu’une seconde, elle hésite. Les lettres de l’enseigne lui agressent la rétine de leur brillant rouillé. Que va-t-elle perdre ici ? « Bonsoir, elle s’approche du comptoir, une vieille femme qui pourrait avoir cent ans ou plus la dévisage, muette, je viens ici pour vos… services et non pour vos produits. » Elle attend un instant, nerveuse. Est-elle au moins au bon endroit ?

Spoiler:

Le regard de la propriétaire des lieux la toise ; bien qu’elle maintienne sa rétine tel l’aigle qu’elle représente, Scylla ne bouge pas d’un cil. Comment une si petite et vieille dame peut-elle être si impressionnante ? Un instant, Scylla croit se tromper, sous ce jugement qu’elle n’arrive pas à supporter, le poids de son secret que la centenaire représente de cette œillade. Elle pense s’être trompée d’adresse, prête à s’excuser. Mais, enfin. « Très bien. Mes prix sont d’ordinaire assez bas, mais vous êtes belle et riche, alors ce sera le double. » La brune n’en croit pas ses oreilles. Dans un mouvement résignée, elle resserre sa cape autour d’elle. La femme l’aurait-elle reconnue ? Son cœur s’emballe mais elle se rend bien compte de la situation – après tout, cette harpie va rentrer dans sa mémoire. Embarrassée dans un tel endroit, habituée aux sommets de l’Olympe, elle attend mal à l’aise que la vendeuse ferme la porte à clés, puis les stores, pour enfin lui faire signe d’approcher dans son arrière-boutique.

Les choses et babioles s’entassent dans des étagères sombres et crades. Ça sent l’humidité et la moisissure, mais elle tente d’y faire abstraction. Si près du but, elle ne veut plus reculer. On lui indique un tabouret, puis d’enlever le bout de tissu qui masque son identité ; elle s’exécute. A nouveau, ce regard perçant qui manque de la faire défaillir – elle ne se savait pas si ébranlable. La morsure l’a visiblement affectée de bien des manières. « Que voulez-vous voir ? » Question fatidique. Impossible de mentir. Elle doit se fier à son instinct. Et à son porte-monnaie. Surtout à son porte-monnaie. « Je veux revoir une nuit d’Avril. La douleur m’empêche de m’en souvenir. » Déclare, puis, dans un soupire, se lance sans regarder la dame. « Je veux savoir qui m’a mordue. Ou du moins récolter des indices. » Elle sait qu’elle risque gros, très gros, à avouer une telle chose à une inconnue. Grindelwald et ses sbires lui rempliront certainement bien plus les poches si elle la dénonce. Alors cette fois-ci, Scylla affronte son regard terrible. Dans le blanc des yeux, elle lui transmet toute cette détresse et toute cette haine, ce besoin de savoir. Dans ce regard, elle lui montre qu’elle s’en remet à elle, entièrement à elle. Les gens aiment qu’on ait besoin d’eux, désespéramment. Ça semble l’attendrir un peu. La fierté piquée, mais elle s’en remettra. « C’est ma foi bien précis. »

Alors, la séance commence. La petite dame est assise en face d’elle, ferme les yeux, pour les ouvrir tout à coup et alors, Scylla se sent plonger dans un abyme infini. Est-ce la fin ? Tous ses membres se tendent, se tordent, elle a l’impression qu’on l’emmène dans une autre dimension. Mais, enfin, quelques instants plus tard, elle retrouve la terre ferme.
« Ne reste pas là, sombre idiote ! » Elle fronce les sourcils, se retourne pour dénicher le visage à l’origine de ces paroles… Atticus ? Son frère se trouve en face d’elle, mais visiblement, ce n’est pas à elle qu’il s’adresse. Coup d’œil de l’autre côté. Une petite fille en larmes semble les pieds cloués au sol, pétrifiée par le regard accusateur du frère. De son frère. Cette gamine, c’est elle, à huit ans. Le sang de Scylla se glace, et pourtant, tout devient flou à nouveau, et cette fois-ci, elle se retrouve face à son mari, Faust. Son visage est défiguré par la colère. Alors, elle comprend. La vieille vendeuse fait des bonds dans ses souvenirs, à la recherche de cette terrible nuit.
Scylla sent ses forces diminuer.
Pourquoi ne peut-elle pas aller droit au but ?
La main de Faust part, s’écrase contre la joue de Scylla.
Elle se sent défaillir. Il faut que ça s’arrête – ça va exploser.

Soudain, elle est à nouveau dans ce cagibis délabré. Le front luisant de sueur, elle manque de tomber. Pourquoi est-elle si éreintée ? Elle n’a seulement vécu que deux vieux et mauvais souvenirs, qu’elle aurait préféré oublier. La vieille dame est-elle si incompétente qu’elle en a l’air ? « Vous n’avez pas la mémoire bien coopérative, je crains que… » « On recommence. » La coupe Scylla en la foudroyant du regard. Hors de question d’abandonner. Dans un élan de courage ou de désespoir, elle se redresse et la mégère hausse les épaules. Ce n’est pas le moment de faillir.

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La requête résonne dans la pièce, et bien vite, la dame hausse les épaules, l’air de dire « je vous aurais prévenu ». Scylla la regarde à peine, le front luisant, fiévreuse, essoufflée. Elle tient fermement les accoudoirs de sa chaise inconfortable et regarde la vieille dans les yeux. Il faut qu’elle recommence. Elle le sent, au fond, elles sont près du but. Scylla a besoin de voir, de savoir, de ses propres yeux.

Alors, la femme rentre à nouveau dans son esprit, et après quelques bonds temporels, arrachant des cris de frustration et de douleur à sa cliente, enfin, la lune éclaire son souvenir. Oui, c’est ça. A l’identique. Est-il seulement possible que ce ne soit qu’un rêve, qu’une illusion ? Scylla sent l’herbe lui chatouiller les chevilles, la brise nocturne lui balayer le visage. Au loin, elle entend la voix de la femme lui intimant de faire vite ; mais elle ne l’écoute pas. Observant autour d’elle, ébahie, elle n’en croit pas ses yeux. Un cri de loup s’approche, la faisant sursauter. Elle y est. Ses jambes ne semblent plus obéir à ses commandes : elle se met à courir, à fuir, pourtant pas le moins du monde apeurée. Ses yeux semblent se détacher de son corps et alors elle n’est plus qu’un fantôme qui survole la forêt, surveillant chaque recoin à la recherche d’un indice, n’importe quoi. Une lueur attire ses pupilles, elle s’approche. Quelques vêtements sont posés là – ou plutôt jetés, des vêtements d’homme, à quelques dizaines de mètres de sa position. Tout d’esprit faite, son corps immatériel se penche, ramasse un petit pendentif qui attire son attention. Elle n’a jamais rien vu de tel. Cercle d’or renfermant un motif étranger, exotique, d’origine africaine si elle en croit ses connaissances, il semble représenter un astre, peut-être un chaudron, voire une créature dont elle ne connaitrait pas l’existence. Mais le temps lui manque pour détailler le médaillon, et dans un cri de douleur, elle se tord et se retrouve propulsée au sol, à nouveau dans son corps. Mais pas dans cette boutique. Pas à Londres, pas dans la réalité. Au sol face à cette bête immense qui la toise, la surplombe entièrement de toute sa sauvagerie. Dans un cri immense qui explose en elle, elle revit toute cette horrible nuit. Une torture comme elle n'en a jamais connu. Un instant, elle se dit que cela est bien plus douloureux que dans son souvenir. Bien plus traumatisant.

Dans un fracas qui l’envoie valser sur la moquette, elle est à nouveau dans l’arrière-boutique de cette enseigne sur l’Allée des Embrumes. Les yeux vitreux, elle se rend à peine compte que sa poitrine et son flan sont douloureux, et que la femme en face d’elle semble s’étouffer ou mourir. La rétine attachée à ce souvenir.

Quelques instants plus tard, une fois la femme remise sur pied – non sans encaisser quelques réflexions désobligeantes de la part de la mégère, elle dépose une bourse bien garnie sur le comptoir et quitte discrètement les lieux en boitant, sans oublier d’enfoncer son visage sous cette capuche de soie ébène. Sans se retourner, elle quitte l’Allée des Embrumes avec une seule idée en tête : enfin, elle a les moyens de retrouver son bourreau. Son assassin.. Celui qui aura éteint son humanité à jamais.  

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