Ghost of the night (Léonce)

La respiration saccadée, le souffle court, un poids sur la poitrine. Iris lutte dans son sommeil. Elle a l'impression qu'on l'écrase, que quelque chose tente de l'étouffer. Elle n'arrive pas à bouger. Encore une paralysie du sommeil sans doute. Quand ce n'est pas l'insomnie qui la guette c'est la paralysie qui survient. Elle est lasse, fatiguée de lutter chaque nuit. Chaque nuit où elle n'est pas dans les draps de Pluton pour dire vrai. Elle force son esprit à s'éveiller, son corps à se soulever. Elle est là désormais, assise entre ses draps de soie, ses yeux cherchent à percer l'obscurité. C'est un mouvement sur sa droite qui la fait sursauter. Elle observe, fronce les yeux, et elle comprend. « Encore vous ? » Il est là le fantôme de cette pauvre femme qui lui est apparue quelques jours plus tôt. Elle se tient droite à ses côtés, les mains croisées devant elle. Elle ne dit rien, pas même un murmure. Iris la fixe, se lève et puis la toise. Elle est agacée par cette présence qui ne cesse de lui rendre visite sans la moindre invitation. Elle n'est pas effrayée la vipère, elle a bien compris que le spectre était inoffensif, mais tout de même, cette situation lui déplaît. La Lestrange croise les bras, attend, puis perd patience : « Si vous ne me dîtes rien, je ne peux pas vous aider. » Et sans prévenir l'ombre disparaît. Il n'y a rien chez cette femme qui ne donne le moindre indice à Iris. Elle ne sait pas qui elle est, ne sait pas ce qu'elle cherche ou ce qu'elle veut. Le fantôme ne parle jamais, ne fait jamais le moindre geste. La silhouette se contente d'attendre dans l'obscurité, se contente d'observer Iris, rien de plus. La féline regarde l'horloge accrochée au mur. Bien, il est cinq heures du matin. Disons que c'est une victoire, que sa nuit a été plus longue que la précédente. Elle décide de s'habiller, et après un café elle part au travail. Elle sait qu'elle sera la première mais après tout, cela n'accentuera que son image de travailleuse acharnée.

Sa journée au ministère est enfin terminée. Il n'y a rien eu de bien passionnant, rien eu d'extravagant, rien qui ne vaut la peine d'être souligné. Iris s'apprête à partir mais lorsqu'elle enfile son manteau elle voit dans le reflet de la vitre le visage de la femme inconnue. Elle soupire, se retourne. Plus personne. Iris ne réfléchit pas plus longtemps, elle sait ce qui lui reste à faire. Elle prend ses affaires et se rend à la Lestrange Mortuary, peut-être que là-bas elle trouvera des réponses. Sur le chemin elle espère ne pas croiser son père en arrivant à destination. Elle l'aime, d'un amour inconsidéré mais elle sait qu'il n'aime pas avoir ses enfants dans les pattes. Une fois devant l'immense bâtisse, elle est satisfaite de constater qu'elle est seule. Bien. Elle pousse les portes de la morgue et se dirige vers une étagère où les dossiers des morts sont classés. Peut-être qu'en fouillant dedans elle trouvera quelque chose, oui peut-être. Cela fait déjà dix minutes qu'elle parcourt les parchemins, qu'elle observe les photos des défunts, mais aucune ne correspond à celle de la femme. Ca l'agace Iris, parce qu'elle a l'impression de perdre son temps, parce qu'elle ne sait pas comment s'y prendre. Alors qu'elle marmonne, elle entend la porte grincer derrière elle. Elle se fige. Sans doute son père. Elle inspire profondément et finit par se retourner. Un sourire illumine tout à coup son visage. Ce n'est pas Léonide, c'est Léonce. Son tendre et délicat petit frère. Elle lâche le dossier qu'elle tient en main et s'avance vers lui. Elle le prend dans ses bras, d'une étreinte chaleureuse, presque maternelle. Elle passe une main dans ses boucles et finit par se détacher : « Que fais-tu ici ? Ne me dis pas que tu as trouvé ta voie professionnelle... » Elle le taquine. Il vient de finir ses études à Poudlard, et toute la famille lui met une pression folle pour savoir ce qu'il va bien faire de sa vie désormais. Iris n'est pas idiote, elle sait très bien qu'il ne reprendra jamais la morgue, et encore moins qu'il ne travaillera jamais avec leur père, pour leur père. En attendant qu'il lui répondre, elle retourne vers les dossiers, en prend un, le regarde et le range. Non décidément elle n'y arrivera pas. Et puis c'est comme un flash dans son esprit. Elle fronce les sourcils et fixe son frère : « Ne me dis pas qu'elle te rend aussi visite toutes les nuits ? » Elle n'a pas besoin d'être plus précise. Son frère possède le même don ou plutôt la même malédiction qu'elle. S'il est là, c'est sans doute parce que l'inconnue lui a aussi rendu visite. D'un côté elle espère se tromper, elle sait à quel point la présence des morts peut torturer l'âme des vivants, tourmenter le cœur des sangs chauds. Elle ne souhaite cela à personne, et encore moins à son frère. Mais d'un autre côté elle espère qu'elle a vu juste. Peut-être pourra-t-il l'aider. Peut-être pourra-t-il la soulager de ses nuits agitées.